Le 6 mai 2018 un groupe d’environ 450 personnes a parcouru les rues de la ville de Genève depuis la cathédrale Saint-Pierre jusqu’à la Place des Nations dans le cadre d’un événement d’envergure nationale appelé la « Marche de vie pour Israël ».
La cité de Calvin a accueilli la dernière étape de cette manifestation débutée le 2 avril à Kreuzlingen sur les bords du lac de Constance. Le parcours, de la cathédrale Saint-Pierre jusqu’à la Place des Nations en passant par la place du grand Mézel, a voulu rappeler la manière dont Genève s’est comportée vis-à-vis de la communauté juive.
Bien avant de devenir ce qu’elle est aujourd’hui, une cité de paix et de tolérance, elle a enfermé et repoussé les juifs hors de ses murs.
A la tête de ce projet, plusieurs associations évangélique suisse-allemande dont Abraham Services en la personne de son directeur, Werner Woiwode. Chaque étape (Kreuzlingen, Zurich, Berne, Payerne, Lausanne, Genève) a accueilli un événement particulier organisé par un comité local.
L’événement en Suisse s’est inscrit dans le mouvement « Marche de vie » fondé par le pasteur Jobst Bittner de Tübingen. Les objectifs de ces marches se résument en quatre points : Se souvenir, se réconcilier, prendre position, bénir et réparer.
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Se souvenir des événements traumatiques vécus par la communauté juive sur les lieux de marche.
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Se réconcilier, dénoncer ces événements, effectuer des demandes de pardon individuelles ou corporatives et offrir l’occasion de rapprochement entre les communautés chrétiennes et la communauté juive.
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Prendre position contre l’antisémitisme sous toutes ses formes.
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Bénir et réparer, faire du bien et réparer autant que possible les torts faits à la communauté juive.
La dernière étape de ce parcours de 424 km au travers de la Suisse s’est ouverte sur la place Saint-Pierre par le rappel de l’héritage du peuple juif transmis à la fois aux chrétiens, mais aussi à toute la société occidentale.
« Nous voulons souligner particulièrement l’héritage que nous avons reçu d’un peuple particulier, le peuple d’Israël », l’allocution de Christian Bussy, président du réseau évangélique genevois, donne le ton de cette journée.
Par la suite, David Bouillon, pasteur de l’église réformée de France a exposé la position peu claire des réformateurs à l’égard de la communauté juive au 16ème siècle. Si Calvin fut plus tolérant que Luther, les protestants émancipés de Rome continuaient à considérer qu’ils étaient le peuple qui remplaçait le peuple juif dans l’élection divine.
Sur la Place du Grand-Mézel, l’abbé Alain René Arbez a dénoncé la mise en place du premier « Cancel » (ghetto ndlr) mondial dans lequel les familles juives ont été confinées avec rigueur pendant plus de 60 ans entre 1428 et l’hiver 1490, date de leur expulsion de la cité.
Puis Rémy Burri, conseiller municipale de la ville de Genève, s’est interrogé sur l’indifférence de l’état genevois pendant les trois siècles et demi qui ont suivi l’expulsion, à savoir l’interdiction de citoyenneté et de cité de la communauté juive à Genève jusqu’à la fin du 19ème siècle.
Le cortège s’est ensuite rendu sans heurt jusqu’à la Place des Nations où plusieurs interventions, intermèdes musicaux et témoignages se sont succédés, dont celui de Paulette, racontant de quelle manière elle a évité de justesse les camps de la mort après avoir été enfermée à Drancy et plusieurs autres camps en France sous le régime nazi.
La deuxième partie de l’événement s’est résolument tournée vers l’avenir.
En prenant conscience que les mécanismes conduisant à l’exclusion des juifs de Genève ont été les mêmes qui ont préparé les consciences à ne pas se lever pour s’opposer à la Shoah, Jobst Bittner a rappelé que devant la montée de l’antisémitisme en Europe sous toutes ses formes, le combat n’est de loin pas terminé, il n’a même pas commencé, selon ses propos.
« L’antisémitisme est omniprésent, il s’est infiltré ou s’infiltrera dans toutes les couches de la société, dans toutes les communautés. Il faut le débusquer, l’extraire, l’extirper. Il faut se lever et le dénoncer », a encore rappelé Grégory Lafitte, directeur des affaires onusiennes de la coalition européenne pour Israël.
C’est par une prise de position commune, lue par le président des églises évangélique libre de Genève, Björn Aronsson et signée par 350 personnes que l’événement s’est terminé non sans émotion avec un message claire
PLUS JAMAIS CA !
Richard Pittet, coordinateur de la Marche de vie à Genève